Le tour de l'Annapurna
Le trek de l'Annapurna est reconnu comme l'un des plus beaux au monde. Les paysages sont époustouflants et font honneur à la réputation du massif. Il ne faut faire que quelques pas pour observer toute la splendeur de la nature himalayenne.
Celle-ci est très diversifiée. Les paysages changent selon l'altitude. Au point de départ, au village de Besi Sahar (800 m), la végétation est luxuriante. En se dirigeant vers le point culminant de Thorung La à 5 416 m, les paysages changent drastiquement pour laisser la place à un désert de cailloux et de neige. Thorung La est connu comme étant le point de passage le plus élevé du monde. En général, pour dépasser cette altitude, il faut faire de l'alpinisme.
Mon amour pour le Népal est instantané. La folie des montagnes s'empare de moi peu après mon arrivée à Katmandou. C'est la deuxième fois pendant mon voyage (la première étant St-Petersbourg) qu'une joie exaltante s'empare de moi parce que je suis dans un pays dont j'ai rêvé depuis si longtemps. Le charme de l'Himalaya est à son plus fort.
Je fais l'achat de mon équipement en attendant Esmé, une Anglaise que j'ai rencontrée dans le bus de Vientiane (Laos) vers Bangkok (Thaïlande). Nous nous sommes donné rendez-vous à Katmandou puisque nous partageons le même projet de trek, celui de l'Annapurna. De plus, faire un trek seul est déconseillé, en cas de blessure, un compagnon peut être salutaire.
On me dit qu'à Katmandou les Népalais sont comme les Indiens, c'est-à-dire in your face! Les phrases les plus entendues sont Hello my friend! What are you looking for? Come and have a look. Tell me your price. Good price for you, good price for me. Ça n'arrête pas. Ils en sont essoufflants. Ils ne sont pas agressifs, ils sont simplement collants. Tant qu'ils ne sont pas dans mes bobettes, ils ne me lâchent pas! Heureusement qu'ils font tout ça en restant sympatiques et en gardant le sourire, ça permet de virer tout ça en joke.
Ça donne un cachet tout particulier à la ville. Du moins au quartier de Tamel. C'est le coin touristique de Katmandou. Tous les trekkers s'y rencontrent pour coordonner leur voyage avec des agences ou pour faire leurs achats avant le grand départ.
Une fois Esmé arrivée à Katmandou, je mets fin à mes derniers préparatifs et on prend le bus vers Besi Sahar. On se fait accrocher à notre sortie du bus par un gérant d'hôtel douteux.
En soirée, il propose (indirectement) à Esmé un plan du genre: Est-ce que tu m'épouserais pour 10 000$ pour que je puisse aller travailler en Angleterre? Certains voient l'argent comme une solution pour tout! Mais, Esmé n'est charmée ni par l'homme, ni par l'argent. Après la nuit dans l'établissement du douteux, on commence notre trek en direction du village de Ngadi.
On fait à peine quelques pas dans la direction du parc de conservation de l'Annapurna que l'on reste surpris par la beauté du paysage. Et ce n'est que le début! Le Népal est devenu rapidement un de mes pays préférés, peut-être même celui que je préfère entre tous. Il faut être sur place pour admirer la nature et les montagnes et voir combien c'est grandiose.
Les deux premiers jours, on est bouche bée devant cette beauté spectaculaire. On a l'impression de n'avoir jamais rien vu d'aussi beau. Il faut simplement contourner une montagne pour apercevoir un paysage qui dépasse en beauté le précédent! Les montagnes sont hautes et massives et on ne se doute pas de la distance qui nous sépare d'elles.
La première fois que l'on aperçoit le pic de Manaslu (8 050 m), on a l'impression qu'il est de l'autre côté des montagnes qui le devancent. En fait ces petites collines ont une altitude de 2 000 ou 2 500 m et Manaslu de notre point de vue semble à peine plus haut, malgré son pic enneigé. En fait, en regardant sur une carte, on constate que Manaslu est situé à 25 ou 30 Km du village dans lequel on se situe! On prend alors conscience de la grandeur. C'est inimaginable!
En chemin, on fait la rencontre de deux autres groupes de trekkers. Le premier est composé de Nikki (Hollandaise), Tobi (Allemand) et de Kai (Aussie). Le second est composé de deux Israéliens: Aviad et Bohaz. On se croise à plusieurs reprises tout au long du trek et la chimie est bonne.
En fait, on s'entend tellement bien que l'on se retrouve de village en village pour dîner ou pour dormir dans la même guesthouse. Après quelques jours, on finit par voyager ensemble et par faire équipe. Aviad et Bohaz resteront quelques Km derrière alors qu'ils doivent respecter le sabbat et ne pas marcher le samedi, ce qui les retarde.
Le trek de l'Annapurna compte 210 Km et se fait en 14 à 16 jours. Le point de départ est à 800 m et le point culminant (Thorung) est à 5 416 m. Il faut une journée d'acclimatation au village de Manang (3 400 m) pour éviter le mal de l'altitude.
Avec l'altitude, la règle est simple: plus l'on monte, plus l'air est rare et plus les pas sont difficiles. La différence se fait bien sentir au-dessus de 3 000 m, où un rien vous essouffle. Monter les escaliers deux par deux, ça devient du sport (no joke!).
La nuit que nous passons à 4 400 m, avant le passage de Thorung, notre respiration est haletante. Je respire profondément et lourdement. La récupération n'est pas à son meilleur, je préférerais quasiment marcher que dormir! La température est passée graduellement de 20-25 C en basse altitude à -3 à 5 C en haute altitude (entre 4 000 et 5 400 m). J'ai donc ma tuque et mes mitaines.
Le jour 9, avant l'ascension vers le passage de Thorung (jour 10), Tobi ne se sent pas bien. Il vomit et a la diarrhée. Il ne mange quasiment pas. On est tous inquiets de son état de santé. On remet en question la suite des événements.
On est résolu à franchir le passage de Thorung, mais nous ne pouvons prendre de risques trop grands.
Après quelques discussions où chacun fait valoir son point de vue, on prend chacun la décision de rester ensemble et de ne pas se séparer. On attend le lendemain pour voir comment se sentira Tobi. Notre équipe est soudée.
Le jour 10, Tobi ne se sent pas beaucoup mieux. Il faut le comprendre, son système n'a rien absorbé (ou rien gardé) dans les dernières 24 heures, sauf une soupe. Sachant que son sort ne s'améliorera pas en peu de temps, on se tourne vers lui en lui disant que s'il veut rester une journée de plus sur place, on le soutiendra et restera avec lui.
Après discussions et réflexions, on envisage de faire la montée de la façon suivante: Kai et moi, qui portons déjà nos sac à dos de 10 Kg, allons porter le sac de Tobi. Il n'aura qu'à avancer à son rythme et à se reposer en chemin au besoin.
De notre côté, Kai et moi on joue les mules tour à tour en prenant le sac de Tobi. Notre corps est mis à contribution entre 4 400 m et 5 416 m. On se partage 1 000 m de montée en altitude avec l'oxygène qui se fait rare. Aucune course possible, on avance un pas à la fois, en prenant soin de garder un rythme lent.
En chemin, nous avons souvent vu des porteurs. Ceux-ci portent les sacs de touristes ou encore portent de la marchandise d'un village à l'autre. Ils sont tout simplement impressionnants. Certains portent des charges pouvant aller jusqu'à 80 Kg, et ce, sur plusieurs kilomètres. Le plus impressionnant, c'est que ces charges sont retenues à l'aide de sangles par leur tête. Leur force physique et leur endurance sont prodigieuses. Il faut connaître la raréfaction de l'oxygène pour savoir à quel point nos capacités physiques sont diminuées en altitude. Leur mérite n'en est que plus grand. Ils ont tout mon respect!
On atteint le point culminant de notre trek après 4 heures de marche. Tobi a réussi son ascension sans trop de difficultés et se sent d'attaque pour la descente de 1 600 m d'altitude vers notre point de repos à Muktinat. Il reprend son sac et nous fait part de toute sa gratitude à Kai et moi. L'équipe est restée soudée et notre moral et notre bonheur n'en sont que meilleurs.
En descendant, c'est à mon tour d'expérimenter des difficultés. Une douleur au genou gauche se fait sentir pendant cette descente à pic. J'ai du mal à suivre la cadence et je prends du retard sur les autres. L'arrivée à Muktinat est la bienvenue et le repos espéré me fait du bien.
Toutefois, la douleur est persistante pendant les deux jours suivants. Kai et Tobi se portent volontaires pour me dépanner et prendre une partie du contenu de mon sac. Je leur en suis reconnaissant. Mais, après deux autres jours à marcher, mon genou ne se porte pas mieux, et ce, malgré le support d'une attelle que Chang (Taïwanais) me prête. Sa générosité me touche, mais malgré ce support inattendu, mon genou me donne le signal que le trek doit prendre fin. Les 130 Km que j'ai parcourus ont raison de ma persévérance.
C'est en laissant toute l'équipe poursuivre sa route vers Naya Pul, la fin du trek, que je prends l'avion depuis Jomson vers Pokara, où l'on se rejoindra. D'ailleurs, en me dirigeant vers l'aéroport, j'ai le bonheur de croiser Aviad et Bohaz, qui nous suivaient en retard d'une journée.
Si certains détails m'échappent, vous les retrouverez probablement dans les photos!
4 commentaires:
Wo!!! Vraiment super, les photos. J'aime BEAUCOUP la dernière, avec toute l'équipée :-)
C'est plate que t'aies pas pu finir le trek... Chokeux!
Cher fils,
béni soit ce genou qui t'a empêché d'aller plus loin. Je me suis vraiment mal senti à te voir suer ainsi en montagne. S'attaquer à pareille escalade sans pratiquement aucune expérience, c'était suicidaire.
Mais tout est bien qui finit bien.
Ton père
Salut JM!
As-tu eu cette impression étrange qu'au-delà de 1 km il n'y a rien qui change dans la perception de la distance? Qu'on descende ou qu'on monte, tant que l'objectif est au-delà d'un kilomètre, on a l'impression que c'est inatteignable!??? Qu'en penses-tu?
Berny!
À mon frère Richard,
C'est facile de prendre des bonnes photos quand les paysages sont époustoufflants ou que tout le monde a le sourire fendu jusqu'aux oreilles!
Pour ce qui du genou... il faut bien que je choke une fois de temps en temps ;-)
À mon cher père qui ne fait pas encore la distinction entre trek et escalade,
Trek = randonnée = marche
Escalade = alpinisme = pour les pros
Je n'ai pas fait d'escalade.
À Bernard,
En marchant sur 200 Km, on se fait à l'idée que ce qui est loin fini par s'approcher. On faisait entre 12 et 20 Km de marche par jour. Mais, parfois, c'est vrai que ça semble inatteignable; surtout avec un genou peu coopérant ;-)
La perception des distances est complètement différentes en regardant les pics enneigés. Je ne suis pas arrivé à m'y faire!
Lorsque j'ai pris la photo du sommet de l'Annapurna II (7 950 m - soit 40 fois la Place Ville-Marie!), mon appareil se situait à 12 Km du pic (en ligne droite). Seulement en altitude, il me dépassait de presque 5 Km au moment de la photo.
Pourtant, selon ma perception du moment, le sommet semblait accessible en quelques heures. Ce qui n'était pas le cas du tout!
Les sommets enneigés semblent toujours proches alors qu'ils sont à des Km.
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