26 novembre 2006

L'enfer c'était Auschwitz

Mon passage à l'Est m'amène en Pologne. Je m'arrête à Cracovie alors que l'on m'a suggéré de visiter cette ville plutôt que la capitale Varsovie. La suggestion m'est aussi faite de passer par la ville d'Oswiecim, mieux connue sous son nom allemand d'Auschwitz.

Le rendez-vous avec la mort

Tout au long de mes récits j'ai souvent parlé des découvertes que j'ai faites tant au niveau culturel, historique ou encore artistique, sans parler des nombreuses personnes que j'ai rencontrées qui ont contribué à l'enrichissement de mon voyage. Le plus souvent ces découvertes s'inscrivent positivement dans le grand livre de l'humanité.

Pour ce qui est d'Auschwitz, son histoire obtient aussi sa place dans le grand livre de l'humanité, mais dans la section des atrocités. Je ne peux imaginer une page plus sombre ou plus noire que celle que les nazis ont écrite en créant les camps de concentration à Auschwitz.

Le génie du mal déployé par les nazis fait preuve d'une cruauté sans borne, d'une intelligence raffinée, d'une hypocrisie et d'un acharnement sans nom dans la terreur. Il est effrayant de penser que toutes ces caractéristiques se retrouvent dans l'être humain, comme quoi nous pouvons être notre pire ennemi. La citation de Plaute prend toute sa dimension ici: l'homme est un loup pour l'homme.

Aucune issue pour un destin fatal

De ce que j'ai retenu, voici le sort partagé par l'ensemble des 1,3 millions de Juifs lâchement assassinés en ces lieux. Premièrement, l'hypocrisie débute alors qu'un secret absolu règnait sur l'existence des camps de concentration. Les Juifs se voyaient offrir par les autorités nazies un billet qu'ils achetaient pour leur déportation. Celle-ci débutait par un voyage de plusieurs jours en train. Les conditions y étaient si atroces que plusieurs passagers mouraient en chemin. La faim, la soif, la faible oxygénation ou encore le manque d'hygiène étaient des vecteurs de maladie dans les wagons du train du désespoir.

Le train du désespoir

A la sortie du train c'était le tri. Dans le calme, un officier déterminait le destin des nouveaux arrivants un par un. La douche pour les femmes, les enfants et les vieillards, ou toutes personnes jugées incapables de travailler physiquement. En réalité, jusque-là on leur promettait un soulagement à leur souffrance pour éviter la panique avant de les diriger vers les chambres à gaz subtilement déguisées en douches communes.

Pour les personnes jugées aptes à fournir un travail physique, c'était le début d'une mort à petit feu. Des journées de travail exténuantes, la malnutrition (pain noir et potages faits de légumes pourris), l'absence d'hygiène (le port des mêmes vêtements pendant plusieurs semaines), la brutalité des geôliers ou les expérimentations médicales de toutes sortes (ai-je besoin de préciser que celles-ci se faisaient sans anesthésie?) venaient à bout des prisonniers en quelques semaines.

La mort à petit feu

Il aurait été heureux de penser que des tentatives d'évasion réussies auraient permis à certaines personnes d'échapper à un destin aussi tragique. De mémoire, il n'en est rien. Personne ne s'est échappé... ou peut-être que si, mais enfin le prix payé par ceux qui restaient derrière était démesuré.

J'espère bien que je n'aurai pas à relater d'autres événements aussi tristes. Comme pour accompagner la morosité de la visite, le soleil n'était pas au rendez-vous, il a fait place aux nuages et à une pluie froide.

Mais, j'imagine que l'absence de soleil ne peut être éternelle, autant pour l'humanité que pour Auschwitz. Quelques mois avant la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les Soviètes ont mis fin à l'occupation nazie en Pologne, délivrant des prisonniers encore souffrants de leur séjour en enfer. C'était un premier rayon de soleil après 5 ans d'orages.

(Cracovie - 11 au 13 novembre 2006)

12 novembre 2006

Le joyau de l'Est

Après mon faux départ de lundi (06/11), c'est mercredi que je décolle en direction de Prague. Davide m'a fait la recommandation de voler au-dessus des Alpes. J'ai vite compris pourquoi! La vue est époustouflante! Je sais que je l'ai souvent dit, mais: la vue était saisissante et surclasse tout ce que j'ai vu depuis le début de mon périple. Je remets les pendules à l'heure.

Je n'ai malheureusement pas pu prendre de photo. Je vous laisse imaginer le paysage: le Mont-Blanc domine les Alpes, il est deux fois plus haut que les montagnes qui l'entourent. Les cimes sont enneigées et je vois les Alpes s'étendre aussi loin que ma vue porte. Par endroits, des nuages s'accrochent à des sommets. La journée est claire et ce paysage reste ancré dans ma mémoire.

Mon arrivée à Prague marque le début de mon passage à l'Est. Au cours des 10 prochains jours je passerai par Cracovie (Pologne), Riga (Lettonie) et Tallin (Estonie). Et de là, je ferai mon entrée à St-Petersbourg. J'ai très hâte d'être en Russie.

JM sur Prague

L'horloge astronomique

Prague fait honneur à sa réputation. Elle est d'une beauté subjugante! J'ai entendu la comparaison entre Paris et Prague voulant que Prague soit la Paris de l'Est et bien moi je dis que Paris est la Prague de l'Ouest. Au niveau de l'architecture et de l'esthétisme, c'est Prague la championne. C'est elle qui établit le standard.

Prague de nuit

Le pont Charles

Loretta

Je loge à l'hôtel Miss Sophie. Le design est soigné et le prix est abordable. C'est parmi les meilleurs endroits où j'ai eu la chance de séjourner. Les critères de base sont respectés, la propreté est au rendez-vous et le personnel est accueillant.

Je fais la rencontre lors de ma première soirée de Monique (Californienne) et nous discutons longuement de voyage. Je lui explique que mon rêve a grandi en moi, comme un arbre qui s'est développé et qui a pris de fortes racines. Voici les mots de St-Exupéry, tirés de son roman Terre des hommes, ils résument bien mon idée: Si dans cette terre, et non dans une autre, les orangers développent de solides racines et se chargent de fruits, cette terre-là c'est la vérité des orangers. Vous aurez compris que pour moi, le voyage est ma vérité.

C'est aussi au Miss Sophie que je rencontre Beryl (kiwi... de la Nouvelle-Zélande) et Peter (Aussie). Nous bavardons longuement et ils me donnent de nombreux conseils en prévision de la Chine. Ils sont tous les deux fort sympathiques. Nous échangeons nos adresses électroniques avec la promesse de visites futures.

Beryl et JM

Un après-midi, je fais la découverte de deux artistes tchèques: Jan Saudek et Alfons Mucha. Saudek est un photographe impressionnant. Il saisit sur sa pellicule l'intimité humaine et la dévoile dans un contexte personnel. Il n'a pas peur de choquer. Mucha de son côté fait partie du mouvement français de l'art nouveau. Je suis persuadé que vous êtes déjà tombé sur l'une de ses oeuvres sans peut-être savoir que c'était de lui. Il travaille dans un style graphique très soigné. Les oeuvres que j'ai vues de lui m'ont toutefois moins impressionné que celles de Saudek.

C'est la première fois de mon voyage que je fais les premiers pas de mes conversations dans une autre langue que celle du pays. La réaction n'est pas la même, le contact est moins bon. Je me sens mal à l'aise lorsque je m'exprime d'abord en anglais.

Je confirme qu'il n'y a rien de mieux pour arracher un sourire que de quitter un endroit en disant en tchèque Dekuji. Ce mot magique m'a permis d'obtenir deux sourires. Ce que Thank you n'aurait pas obtenu.

Le prisonnier d'une taverne

Un garde fait le guet



(Prague - 8 au 10 novembre 2006)

04 novembre 2006

Une histoire de visas

S'il y a bien une chose qui ne passionne pas dans les voyages et qui fait partie de la préparation, c'est la question des visas. Toute la paperasse demandée, la complexité relative à certaines demandes, les délais d'obtention et les coûts sont autant d'obstacles pouvant ralentir la plus ardente motivation. Ajoutez à cela que je fais ces demandes à l'extérieur de mon pays d'origine et sans permis de séjour pour la Suisse et vous avez un gros mal de tête devant vous.

C'est l'impasse!

Bon, je vous entends déjà me demander pourquoi je n'ai pas géré tout ça avant de partir. Oui, oui, je sais que ça aurait été bien plus facile ainsi. Toutefois, au moment de mon vol pour Paris, mon itinéraire n'était pas aussi arrêté qu'il peut l'être maintenant. Par exemple, j'ai ajouté la Russie comme destination, ainsi que la Chine. Mais, je ne plongerai pas dans de plus profondes explications sur le sujet puisque je suis à court d'arguments et que j'augmenterais mon ridicule dans ma tentative. Ne vous en faites pas, ce n'est pas la première fois que le sujet est abordé!

Bon à part du fait qu'une demande de visa rime avec: paperasse, complexité et découragement, voici comment ça s'est passé...

Le visa indien m'a tout simplement été refusé. Pourquoi? Parce que je n'ai pas de permis de séjour en Suisse, je suis ici à titre de touriste. Point final. Je suis bredouille.

Mais, grand merci au Viet-Nam. Ce pays est le plus simple bureaucratiquement et je l'obtiens pour 70 CHF (francs suisses, où 1 CHF = 1 $CDN) en trois jours ouvrables, quel soulagement. C'est un début!

Ma deuxième cible est la Russie. C'est certainement le visa le plus compliqué à obtenir. Pour les raisons suivantes: il faut être invité officiellement (papier à l'appui) par une personne ou une organisation russe et il faut dire avec précision les dates d'entrée et de sortie du pays, il n'y a pas de jeu possible. Mais comme je rencontre les exigences demandées, le visa me sera accordé pour 140 CHF et une semaine d'attente.

Pour la Chine, la demande n'est pas aussi compliquée que la Russie, mais elle n'est pas aussi facile que le Viet-Nam. Ils sont sans aucun doute les plus efficients, puisque pour 105 CHF j'obtiens le visa une journée plus tard.

Il est à noter que pour le visa russe, je l'ai obtenu à titre exceptionnel. Le gars a mis l'accent sur exceptionnel. Puisque je n'ai pas de permis de séjour en Suisse, je n'étais pas supposé obtenir de visa. Merci à Alla (une collègue de F & P) qui m'a mis en contact avec un de ses amis qui est agent de voyage à Genève et qui en intercédant au consulat en ma faveur m'a donné un grand coup.

Pour le visa chinois, j'ai frôlé le même refus. N'ayant toujours pas de permis de séjour on ne voulait pas me faire de visa. Pendant un instant je croyais tout perdu. Mais, une deuxième agente consulaire s'est penchée sur mon cas et à force de discussion et d'arguments a accepté de répondre à ma demande.

Ai-je besoin de préciser que l'ambiance des consulats et des ambassades est en général plutôt froide. Les gens sont neutres et distants. Ce n'est pas l'endroit pour conter une joke. Ils ne riraient même pas la meilleure. Et partout, les agents consulaires sont séparés du public par une vitre. Si vous ajoutez à cela que plusieurs ambassades et consulats sont entourés de clôtures et de barbelés, vous vous sentez moins bienvenu.

Sinon, mon expérience de la Suisse me laisse heureux du voyage que je vis. J'ajoute même que je fermente le projet de m'expatrier un an ou deux, à l'instar de Maxime et Zoé. Leur vie helvète est réussie et elle propose un enrichissement culturel qui n'est pas possible autrement. Pour ma part, j'envisage l'Australie comme terre d'accueil. La Suisse me plaît bien, mais les gens y sont distants face aux étrangers, voire protectionnistes.

(Morges - 15 octobre au 7 novembre 2006)